MONROE Della Mae
Née Della May HOGAN.
Egalement Della Mae Graves, Della Mae Grainger.
Date de naissance : 1er juillet 1876, comté de Brunswick, Missouri.
Date de décès : 23 août 1927, au Norwalk State Hospital de Los Angeles, Californie.
Grand-mère de Norma Jeane.
Adresses
* 1904 : 2511 Folson Street, Los Angeles
* 1910 2440 Boulder Street; 1114 East 10th Street, Los Angeles ()
* 1912 324 bis South Hill Street, Los Angeles (chez son deuxième mari, Lyle Graves)
* 1916 26 Westminster Avenue, à Venice (Californie, au sud de Santa Monica)
* 1917-1920 1410 Coral Canal Court, Venice; chez Charles Grainger ().
* 1926 418 puis 206 East Rhode Island Street, Hawthorn (Californie) ,
Histoire
Ses parents Tilford Marion Hogan et Jennie Nance, étaient originaires du Missouri.
Elle était la deuxième de 4 enfants.
La dure vie paysanne emmena les Hogan de l'est vers la Californie dans les années 1890.
Ses parents se séparèrent lorsqu'elle avait 13 ans; elle passa les années suivantes à vivre alternativement avec un parent puis avec l'autre.
En 1898, elle rencontra Otis Elmer Monroe (14 mai 1866, Indiana-22 juillet 1909, Californie), un peintre en bâtiment, récemment débarqué de l'Indiana. Il avait dix ans de plus qu'elle.
Il ambitionna d'aller un jour en Europe pour étudier la peinture. Il pimentait ses conversations de discours sur les peintres français et sur la Belle Epoque parisienne dont il avait vu des gravures dans les magazines.
Fin 1899, après une cour assidue, Della l'épousa.
Les photos de l'époque montrent une femme de taille moyenne, au visage rond et fort, aux yeux sombres, à la mâchoire un peu sévère et au maintien étonnamment assuré : une jeune mariée sans la moindre timidité.
Il n'existe pas de portrait d'Otis, mais Della le décrivit avec une peau claire, des cheveux roux et les yeux noisette.
En 1901 ils allèrent vivre au Mexique, à deux pas du Texas et d'Eagle Pass, dans une ville qui s'appellera Piedras Negras (avant de s'appeler encore plus tard du nom du président du Mexique, Porfirio Diaz), où Otis avait trouvé un emploi mieux rémunéré dans les chemins de fer mexicains (Mexican National Railway).
Au début, Della Mae fut triste d'avoir quitté les Etats-Unis.
Souvent elle sortait sur son porche pour mieux contempler le pont qui, par dessus le Rio Grande, menait au Texas.
Mais elle sut s'adapter et bientôt se sentit très à l'aise dans le rôle qu'elle s'était attribuée : donner des cours aux Indiennes et aux Mexicaines à qui elle servait, occasionnellement de sage-femme.
A l’automne 1901 Della fut enceinte.
Le 27 mai 1902 naissance de Gladys Pearl.
Elle fut déclarée à un juge civil mexicain, cinq jours plus tard (soit le dimanche 1er juin ou le lundi 2 juin).
Au printemps 1903, Otis trouva un emploi mieux rémunéré à Los Angeles ; ils louèrent un petit bungalow d'une seule pièce dans la 37ème Rue Ouest (secteur sud du centre-ville).
Otis travaillait à la Pacific Electric Raimway (trams, trolleys et wagons proliféraient pour relier les différents quartiers d'une ville en pleine expansion).
Le 6 octobre 1904, naissance de Marion Otis Elmer ().
Entre 1903 et 1909, ils habitèrent pas moins de onze maisons ou appartements meublés.
Avec une telle instabilité et une telle précarité, les enfants Gladys et Marion, sans être privés du nécessaire, vécurent leurs premières années dans l'insécurité; toujours par monts et par vaux (comme l'avait été Della dans son enfance), ils n'avaient aucun moyens de lier de véritables amitiés.
En 1907 le mariage d'Otis avec Della Mae fut mis à rude épreuve.
Otis oubliait souvent de rentrer après sa journée de travail; quand il rentrait Della lui demandait où il était allé, et il répondait invariablement "Je ne m'en souviens pas". Parce qu'il lui arrivait de boire beaucoup, Della n'était pas vraiment surprise de ses trous de mémoire.
En 1908 la conduite et la santé d'Otis se détériorèrent avec une rapidité alarmante. Sa mémoire de fit capricieuse, ses réponses souvent hors de propos, il souffrit de violents maux de tête et sa tenue se négligeait de plus en plus.
Des accès de rage, qui effrayaient Della et les enfants, alternaient avec des crises de larmes et il fut bientôt pris de violents tremblements, suivis parfois d'attaques.
Eté 1908 Otis fut à moitié paralysé.
En novembre 1908 il entra au Southern California State Hospital, à Patton (comté de San Bernardino)
On diagnostiqua une parésie générale, stade ultime de la syphilis nerveuse (le traitement de cette maladie ne fut découvert qu'en 1908).
Cela signifierait que contrairement à de nombreuses interprétations, sa maladie mentale était due à une pathologie circonstancielle et non à une maladie héréditaire.
Della alla le voir à l'hôpital seulement pendant les premiers mois.
Ensuite, il sombra dans une complète démence; il ne la reconnaissait plus.
Devant subvenir aux besoins de ses enfants, elle avait dû se mettre à travailler.
Le 22 juillet 1909, sans avoir quitté son lit d'hôpital pendant neuf mois, Otis mourut. Il avait 43 ans.
Terrifiée, peut-être, par le fulgurent déclin mental de son mari, Della raconta à ses enfants que leur père était devenu fou, peut-être à cause de l'alcool, peut-être à cause de sa vie désordonnée.
Pourtant le dossier médical qu'on lui remit après la mort d'Otis, explique clairement qu'il était décédé d'une maladie organique et non d'une maladie mentale.
Della, Gladys et Marion furent, malgré tout, intimement convaincus que leur époux et père, qui mourut d'une infection qui avait détruit ses cellules nerveuses, avait été emporté par la folie.
Della commença à adopter une attitude très digne, une mélancolie mêlée de stoïcisme. Elle travaillait consciencieusement et fréquentait, avec ses enfants, une des églises protestantes les plus proches, « pour qu'ils prient pour la santé de leur propre esprit ». Mais malgré cet excès de piété transitoire, elle avait gardé toute l'exubérance et l'impétuosité de sa jeunesse (elle n'avait que 33 ans).
En 1910 elle recevait de beaux partis célibataires et des veufs dans sa maison du 2440 Boulder Street.
En 1910 et 1911 Della se fiança plusieurs fois avant de se décider pour un nouveau mari.
Elle rencontra rapidement, Lyle Arthur Graves, âgé de 39 ans, un homme timide et appliqué.
Originaire de Green Bay (Wisconsin), il avait travaillé à la Pacific Electric avec Otis. Il était depuis aiguilleur en chef.
Le 7 mars 1912 elle se maria avec Lyle Arthur Graves (24 mars 1882, Wisconsin-1er mars 1968, Ohio)
La famille s'installa dans la maison de Graves, au 324 bis South Hill Street dans la partie nouvelle du quartier d'affaires de Los Angeles.
Très vite Della se rendit compte de son erreur : Lyle avait lui aussi un très net penchant pour la boisson et avait un tempérament violent.
En novembre 1912 elle quitta le domicile conjugal avec ses deux enfants et logea dans un meublé.
Pour Noël 1912 elle retourna chez Graves, apparemment parce qu'elle était à bout de ressources. Mais malgré les cadeaux que Lyle fit aux enfants, la réconciliation fut de courte durée.
Graves avait pourtant laissé à Della la gestion de son propre salaire.
En mai 1913 Della quitta Graves définitivement.
Le 17 janvier 1914 le divorce fut prononcé. Della accusa Graves de « ne pas lui avoir assuré le soutien matériel, de débauche et d'intempérance chronique ».
Fin 1916 elle loua une chambre dans une pension de famille au 26 Westminster Avenue à Venice (Californie, au sud de Santa Monica). Le propriétaire de la pension de famille s'appelait Jasper Baker et l'engagea pour diriger sa propriété pendant qu'il s'occupait d'une salle de jeux sur la plage.
Elle envoya son fils Marion, âgé de 11 ans, vivre chez des cousins à San Diego; Della pensait qu'un garçon devait être élevé par un homme.
Le 1er janvier 1917 au cours d'une soirée dansante pour fêter le Nouvel An, Della rencontra un charmant veuf d'1 mètre 85, Charles Grainger.
Les jours suivants, il vint lui rendre visite presque tous les soirs à Westminster Avenue.
Pour Della, la vie de Grainger était de loin plus exotique que tout ce dont avait pu rêver Otis Monroe. Il travaillait dans l'industrie pétrolière.
Il habitait non loin de chez elle, au 1410 Coral Canal Court, dans un modeste bungalow de deux pièces qui donnait sur un des nombreux canaux de Venice. C'était une adresse bien charmante, et quand elle découvrit l'endroit, Della succomba à son charme.
Vivre ensemble sans être mariés n'était pas plus toléré, à cette époque, que l'avortement ou le divorce, mais malgré tout, Charles et Della examinèrent de près l'idée de partager Coral Canal Court.
Della se fit tout simplement appeler Mrs Grainger et on n'y vit que du feu.
Les perspectives d'emploi de Charles étaient des plus incertaines et il espérait de nouveaux contrats à l'étranger.
De plus il devait subvenir aux besoins de deux fils restés dans le nord de la Californie.
Il n'avait certainement pas dû être enthousiasmé par l'idée d'être légalement responsable de l'entretien de Della et de sa fille.
A la fois circonspecte devant ce nouveau père et contrariée de voir sa mère vivre une situation dont l'irrégularité ne lui procurait aucune stabilité affective, Gladys n'était pas heureuse. Elle le montrait à Grainger en lui opposant un silence absolu, sinon une humeur massacrante. Della se mit alors à trouver sa fille empoisonnante, d'autant que l'offre de Charles Grainger de vivre avec lui se faisait attendre.
Le 17 mai 1917 Gladys épousa John Newton Baker.
Della Monroe déclara que sa fille a 18 ans (elle n'en a en fait que 14) sous prétexte qu'il n'y avait pas de preuves de sa vraie date de naissance, car ils avaient récemment déménagé de l'Oregon pour la Californie.
Della, tout sourire, assista au mariage puis attribua la chambre de Westminster Street aux jeunes mariés, et emménagea en vitesse dans le bungalow de Charles Grainger.
En 1918 Charles Grainger trouva un emploi non pas dans le pétrole, mais comme directeur du Pickering Pleasure Pier de Santa Monica, où il avait un salaire régulier.
Les rapports de Della avec ses précédents maris ayant été très perturbés, elle vivait souvent séparée de Charles Grainger, pendant des jours, voire des semaines.
Della avec ses petits-enfants
1921 ou mars 1922 Della était retournée chez Charles Grainger, puis de nouveau quitté.
Gladys quitta le domicile conjugal et loua un bungalow au 46 Rose Avenue, à Venice, qu'elle partagea avec sa mère.
Gladys signa un bail au nom de Della Monroe, où elle accepta de sous-louer deux des chambres, d'être payée comme gérante et de verser 100$ par mois aux propriétaires absents, Adele Weinhoff et Susie Noel.
Fin juin 1922 le dernier chèque du loyer n'avait pas été posté. Il y eut alors une féroce dispute entre Gladys et Della, chacune accusant l'autre de dilapider l'argent. N'ayant d'emploi ni l'une ni l'autre, l'essentiel de leurs revenus leur était versé par Charles Grainger, le reste consistant en une modeste somme qu'envoyait John Baker.
Leur courte expérience de colocataires prit fin en juillet, avec une énergique menace d'expulsion.
Della, avec la permission de Charles Grainger, partit habiter dans un bungalow vide qu'il possédait à Hawthorn.
En 1924 Marion se maria avec une de ses camarades de classe, Olyve Brunnings.
Gladys se maria avec Martin Mortensen le 11 octobre 1925, pour le quitter quelque mois après.
Fin année 1925 Gladys apprit qu'elle était enceinte.
Ne vivant plus avec Grace McKee, séparée de son mari et empêtrée dans des formalités de divorce, elle retourna chercher un soutien chez sa mère.
Della réagit mal à la situation de sa fille; elle ignora les plaintes et les pleurs de sa fille et s'en alla pour le voyage en Asie du Sud-est qu'elle avait programmé depuis longtemps, en compagnie de Charles Grainger, qui y avait été envoyé par la Shell, pour son travail.
Le 24 février 1926 Della fit une demande de passeport pour son voyage à Bornéo prévu pour le 30 mars 1926
Sur cette demande, la date de mariage de Della et Charles Grainger était stipulée comme ayant eu lieu le 25 novembre 1920.
Le 27 mai 1926 elle envoya une carte postale de Bornéo, à ses petits enfants Berniece et Robert Baker, qui vivaient avec leur père dans le Kentucky. Elle ne semblait pas savoir que les enfants n'avaient pas de nouvelles
La légende est : « Dear Little Berniece, This is kind of big snakes they have here. They are big enough they could swallow you and Jackie and so could the alligators. They have lots of fun here hunting them. This is your mother's birthday. Do you and Jackie ever write to her, write to me. Your grand mother Mrs Chas. Grainger ».
En juin 1926 elle fut de retour de ses aventures exotiques. Quand elle découvrit Norma Jeane, deux semaines après sa naissance, elle incita Gladys à la placer chez un couple sérieux et dévot, les Bolender, qui habitaient Hawthorn (banlieue ouvrière de Los Angeles, actuellement l'aéroport international), dans la même rue qu'elle. Ils s’occupèrent de la petite fille durant 7 ans.
Comme beaucoup de familles à l'époque, les Bolender arrondissaient leurs revenus en prenant en charge un enfant. Pour endosser cette responsabilité, ils étaient payés 20 à 25$ par mois, soit par les parents naturels, soit par l'Etat de Californie.
Della était devenue une adepte dévouée de soeur Aimee Semple Mc Pherson et fit baptiser Norma Jeane le 6
décembre 1926 à la Hawthorn
Foursquare Church (4503 puis 4511 West Broadway à Hawthorn) .
Au début de l’année 1927, son coeur commença à faiblir et elle fut atteinte de fréquentes infections respiratoires.
Elle dépendait totalement de Gladys, qui, en dépit du surcroît de transport en trolley pour aller à son travail, était venue s'installer chez elle.
A la fin du printemps Della était au plus mal; ses problèmes respiratoires étaient aggravés par l'évolution de sa maladie du coeur, ce qui la plongeait dans une dépression des plus sombres.
Les remèdes ne la soulageaient qu'épisodiquement.
Dans les intervalles, comme beaucoup de malades atteints de troubles cardio-pulmonaires, elle dérivait dans de plaisantes rêveries, des délires et des moments de franche euphorie.
Gladys ne pouvait s'empêcher de penser au comportement fantasque de son père, lors de ses dernières années.
A cette époque elle aurait fait une crise qui peut avoir été à l'origine de ses imprévisibles sautes d'humeur.
En juillet 1927 Della se persuada que sa fin approchait. La culpabilité et les souvenirs alternaient avec les hallucinations : ses parents, Tilford et Jennie Hogan s'étaient réconciliés, raconta-t-elle à Gladys. Ils allaient venir à son secours, ils la ramèneraient chez elle. Peu de temps après, elle se glissait hors de chez elle et marchait jusqu'à la maison des Bolender pour voir sa petite-fille. Elle tambourina à la porte puis, furieuse de ne pas obtenir de réponse, brisa la vitre de son coude.
Le 4 août 1927 elle fut hospitalisée au Norwalk State Hospital où l'on diagnostiqua une myocardite aiguë (inflammation du coeur et des tissus environnants).
Elle mourut le 23 août 1927 (), d'un arrêt cardiaque pendant une crise de folie, ce que Gladys puis Marilyn elle même considéreront comme une malédiction familiale.
Gladys s'occupa des funérailles, et fit enterrer Della près de son premier mari, Otis Elmer Monroe, au Rose Hill
Son certificat de décès mentionne comme cause du décès une myocardite ainsi qu'une « psychose
maniaco-dépressive » . Ce dernier terme avait été ajouté car Gladys n'avait cessé de répéter aux médecins du Norwalk State Hospital que l'humeur de sa mère avait varié de manière imprévisible pendant ces dernières semaines.
La grave maladie cardiaque de Della avait en fait été très mal soignée. Les médecins ne l'avaient examinée que trois ou quatre fois, et elle-même oubliait souvent les doses de médicaments qu'elle devait prendre. Les affirmations de Gladys sur l'état mental de sa mère, expliquent qu'il ait été ajouté la mention de psychose quand, le lendemain de la mort de Della, le responsable du service signa le certificat de décès.
Car le dossier médical de Della ne comporte aucune analyse psychologique, ni rapport de neurologue. En fait il semblerait que Della Monroe (elle apparaît sous ce nom dans les archives médicales) soit décédée d'un maladie cardiaque, qui suite à l'insuffisance d'oxygénation du cerveau, causa de graves dommages cérébraux.
Comme son mari, Otis Monroe, rien ne prouve qu'elle ait été folle, mais chez Gladys, le mythe de la démence familiale se consolidait.